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L'Histoire d'Epsylon

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Message  Epsylon Sam 1 Aoû - 15:37

    « Elle a été élevée par les assassins de ses parents, ils ne s’en sont jamais cachés. »

    Epsylon nourrissait sa haine avec une rare acuité, tandis qu’ils croyaient benoîtement qu’elle s’était rangée à leur avis, à leur stupide, ridicule et foutu avis. Ce n’était rien de plus qu’une vaste comédie, une farce de mauvais goût, pour elle qui ne vivait que pour le jour où elle pourrait enfin se libérer de ces chaînes d’argent massif enroulées autour de ses poignets, ses chevilles, s’enchevêtrant dans un joyeux bordel sur ses épaules, imposées par une volonté inconnue et dénuée de regrets, malgré le sang suintant encore sur ses mains souillées. Son sang.

    Ils disaient d’eux qu’ils étaient des élus, nés privilégiés par la normalité, chargés de chasser le rebus de ce schéma originel dont ils sont les fruits les plus juteux et les plus mûrs. Tout ce qu’Epsylon voyait, c’était des hommes aux chevilles enflées pétris par la peur de se retrouver détrônés d’un siège imaginaire et d’être séparés de chimères douces et réconfortantes au profit d’un monde qu’ils ne voulaient pas. Un monde dans lequel ils n’étaient que de simples Humains, doués dans les travaux manuels mais dénués de tout potentiel magique, aussi minime soit-il. Un monde sur lequel ils n’avaient aucun contrôle.

    « Les cadavres jonchaient sa vie comme une forêt serait tapissée de champignons vénéneux. »

    Elle n’avait que quatre ans quand ils sont venus ; son âge l’avait sauvée, son âge l’avait condamnée. Sauvée de la mort, mais condamnée à vivre avec eux, avec un homme qui la disait sa fille, mais la regardait comme il regarderait un chien, avec un peu de pitié, là, au fond de ses prunelles, comme il regarderait un pauvre chien errant, sans éducation et la peau sur les os, qu’il avait recueilli parce qu’il lui faisait de la peine. Il n’y avait rien de plus humiliant au monde que de se voir adresser un tel regard, pas même l’idée qu’il se faisait de la façonner en une arme qu’elle savait redoutable, contre leurs adversaires farouches. Parce qu’elle savait que si elle était encore vivante aujourd’hui, c’était uniquement parce qu’elle avait été suffisamment jeune à la mort de ses parents pour qu’elle soit encore influençable. Influençable au point de se faire une raison et croire ainsi que la vérité et la justice étaient de leur côté.

    « Leur absurde utopie aura leur peau », disait-elle à sa jument, Hespéride, lorsqu’elle se retrouvait seule dans les écuries.

    Hespéride était son seul réconfort, dans cette villa blanche aux colonnes ioniennes, nichée au bord d’une falaise au bas de laquelle les vagues agitées de l’Atlantique s’échouaient dans un feu d’artifice d’écume blanche. La jument couleur de sable à la crinière d’onyx, rejetée par ses propriétaires pour sa petite taille, l’écoutait chaque jour et, quand Epsylon, vaincue par sa détresse et sa perte d’espoir, se laissait tomber dans la paille, dans un coin du box, elle venait là, tout à côté, s’allongeait avec milles précautions, et soufflait dans le cou de sa jeune cavalière, fourrant son soyeux nez dans le creux de son épaule.

    « Tout ça parce que tout le monde les appelait « Les Enchanteurs du village d’à côté… » »

    Ses parents n’avaient jamais rien fait de mal. La main experte de sa mère concoctait des médicaments, des onguents et des potions destinées à soigner le mal rongeant les habitants quémandant leur aide ; son père récitait dans un murmure soyeux des incantations pour éloigner les bêtes sauvages des cultures, des troupeaux et protéger d’une bonne étoile les jeunes nouveau-nés qu’on lui présentait. Que cela marche ou non, qu’importe ! Ils n’avaient tué personne, n’étaient à l’origine d’un quelconque malheur ; et pourtant, on les a tués. Tués par la jalousie et la peur panique d’un autre dépourvu de ce pouvoir bienfaiteur : « mieux vaut prévenir que guérir ». C’est ce que le Gouverneur avait dit, quand il l’avait accueilli dans sa maudite villa à trois étages, aux immenses fenêtres bordées de lourds rideaux blancs brodés d’or, aux lits à baldaquin et aux lustres étincelants, après qu’elle y fut emmenée par le chef du petit groupe de mercenaires dépendants des sommes versées par son… père adoptif.

    « Maman, pourquoi je m’appelle Epsylon ? »
    « C’est le nom d’une étoile. Epsilon, là, tu vois ? »
    « Pourquoi il y a un « y », dans mon prénom, alors ? »
    « Parce que tu vaux plus qu’une étoile. »

    Epsylon sourit.


    Le sourire était un corps étranger, une habitude échappée, une chimère lointaine, un mode d’emploi égaré. Lui souriaient-ils, eux ? Jamais par douceur ou par amour. Quelle importance d’être présentée comme la fille du Gouverneur, si c’était pour être traitée comme une étrangère lépreuse ? Elle ne constituait qu’un vulgaire faire-valoir pour attiser les faveurs des mondains qu’ils recevaient dans leur grande salle de bal, en vantant leur bonté par déformation de la réalité, racontant à qui veut l’entendre que, dans leur grande mansuétude, ils ont recueilli une petite fille souillée par le péché mais dont l’âme demeurait à portée de secours, qu’ils élevaient avec tous les égards qu’ils devaient à leurs propres enfants. Oh, bien sûr, Epsylon a toujours mangé à sa faim, bu à sa soif, monté à son envie, lu à son goût, et appris en compagnie du fils naturel du couple, du même âge qu’elle. Seulement, que vaut un toit, du pain, de l’eau et de l’instruction quand la famille ne suit pas ? Si le Gouverneur daignait la regarder, sa femme l’ignorait avec superbe, tandis que leur fils la persécutait quand il n’avait rien de plus intéressant à faire, c'est-à-dire tout le temps.

    Ils lui avaient même volé son identité. D’Epsylon, devenue Elizabeth.
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Message  Epsylon Sam 1 Aoû - 15:42

    La maison grouillait de domestiques. A l’instar de ces dieux en lesquels croyaient les hommes antiques, même la plus insignifiante des tâches avait son domestique attitré. Alors, quand Epsylon apprit que le Gouverneur lui-même prenait la peine de se déranger pour un voyageur de grand chemin, la curiosité incrédule l’emporta sur l’animosité étouffante. Petite, elle avait été forcée d’apprendre plus qu’on ne lui a appris, à avoir la présence d’une ombre. Aussi, elle se glissa hors de sa chambre trop grande pour elle, traversa les couloirs, flanquée de la seule domestique qui lui avait, un jour, adressé la parole autrement que pour la dénigrer. Son regard doux mais craintif n’avait rien d’hostile, elle n’avait jamais parue dégoûtée par la nature d’Epsylon. C’était grâce à elle si la jeune fille était au courant des affaires de la villa, auxquelles ni le Gouverneur, ni sa femme et encore moins leur fils ne la mêlait. Au moment où elles arrivèrent près de la porte close du salon, Epsylon perçu des éclats de voix ; elle pouvait remercier son « père adoptif » d’avoir de la voix, quand il était contrarié.

    « Je vous répète qu’elle ne partira pas ! », s’époumonait-il.
    « J’ignore ce qu’il est venu faire ici », chuchota la domestique à l’attention d’Epsylon. « Mais il a une requête suffisamment extraordinaire pour qu’il se déplace. »

    Epsylon approuva d’un signe de tête. Elle aurait voulu être une petite souris pour savoir ce qui le contrariait autant… Ne pouvant pas l’être, juste pour déranger le Gouverneur et le mettre un peu plus hors de lui, elle décida de mettre les pieds dans le plat. Seulement, la poignée tourna avant qu’elle n’ait pu l’actionner elle-même, et le battant retiré de son jumeau laissa s’encadrer la haute silhouette carrée d’un homme robuste, aux yeux noirs profond, emmitouflé dans une cape de voyage de grosse toile couleur de terre. Ses yeux s’ancrèrent dans ceux d’Epsylon, et l’intensité de son regard vint à en couper le souffle de la jeune fille, qui devait faire facilement une tête de moins que lui – et pourtant, on disait d’elle qu’elle était plus grande que la moyenne. Elle ne savait pas comment réagir, si elle devait prendre peur, ou supporter avec fierté son regard ; elle ne savait pas comment le considérer, avec respect, indifférence ou méfiance. Elle opta pour la dernière solution ; elle recula d’un pas. Aussitôt, il lui saisit le poignet avec une force inouïe, et se tourna vers l’intérieur de la salle.

    « Merci pour votre hospitalité. »

    Et, sans demander son reste, il s’échappa de la villa, traînant derrière lui une Epsylon à l’équilibre précaire. Son poignet emprisonné la faisait souffrir, tordu sans considération aucune par la volonté d’un homme inconnu manifestement décidé à l’obliger à le suivre. Epsylon n’eu cependant pas le temps de chercher à se dégager, quitte à le mordre, qu’il la jeta plus qu’il ne la poussa dans les écuries.

    « Selle ta jument, prend le nécessaire pour t’occuper d’elle. »

    Quand il revint, Epsylon ne savait pas encore pourquoi elle s’était exécutée. Elle bouclait la sangle lorsqu’il se matérialisa à ses côtés ; il portait sur l’épaule l’arc qu’elle avait l’habitude d’utiliser lors de ses séances de tir à l’arc, ainsi que son habituel et fidèle carquois de flèches au cuir usé. La jeune fille semblait nager dans un état second, commandée par un instinct étranger, auquel elle n’arrivait pas à opposer sa propre volonté. Il ordonnait, elle écoutait.

    « Pourquoi ? », se contenta-t-elle de demander.
    « C’est ce que tu voulais, non ? », répondit-il. « Quitter cet endroit. »
    « Et les mercenaires ? Les hommes d’arme à la botte du Gouverneur ? Où sont-ils ? Ils auraient dû être là depuis longtemps. »
    « C’est vraiment important ? »

    Epsylon le scruta d’un regard absent.

    « Non. Pas vraiment. »

    Et elle grimpa sur le dos d’Hespéride. L’homme lui tendit, sans un mot, l’arc et les flèches ; machinalement, elle les fixa sur son dos, callés sur ses épaules, tandis qu’il se hissait le dos d’un lourd destrier, bien plus grand que la petite jument, à tel point que la tête d’Epsylon atteignait à peine la taille du cavalier – celui-ci étant grand lui-même – aussi sombre que l’onyx, enveloppé d’une aura à la fois calme et féroce. S’enroulant dans cette aura comme si elle s’enfouissait dans sa couette de plumes, Epsylon se sentit soudainement en sécurité, tant et si bien qu’elle su d’instinct que personne ne saurait les arrêter. Si elle avait précédemment douté de l’intégrité de cet homme et de la raison qui le poussait à la revendiquer elle, sa méfiance avait disparu, remplacée par la confiance en lui. C’était comme si elle le connaissait depuis longtemps… Très longtemps. L’impulsion de son destrier le propulsa loin devant ; Hespéride dû doubler ses foulées pour se maintenir à sa hauteur. Lancés, ils dévalèrent, en équilibre au-dessus de la selle de leurs chevaux, la pente qui menait à la villa du Gouverneur ; ils rencontrèrent les corps inertes de certains gardes, mais Epsylon ne fit aucun commentaire. Sans ralentir l’allure, ils traversèrent la ville, bousculèrent des passants, ne prévenant pas de leur arrivée, choisissant de laisser les fers des chevaux claquant sur les pavés s’en charger. Ce qui était étonnant était la docilité d’Hespéride : la jument était partie au galop, seule, sans qu’Epsylon n’ordonne quoi que ce soit, et le suivait sans broncher. Elle qui rechignait souvent à obéir à sa cavalière, alors, qu’elle obéisse à un second cheval…

    « Ils t’ont élevée ? »
    « Comme on élèverait un enfant… La considération en moins. »
    « Je connaissais tes parents. »
    « Vraiment ? »
    « Oui. Ils étaient adorables. J’ai vécu chez eux pendant que ta mère était enceinte de toi, je suis parti peu de temps avant ta naissance. J’avais entendu parler d’un endroit où les personnes comme nous se réfugient, loin de la persécution. Beaucoup d’entre nous s’y sont exilés, et nous y sommes tous heureux. Cet endroit n’est pas visible ni atteignable par ceux qui ne croient pas en nos pouvoirs – ou qui n’en ont pas. »
    « Ceux qui n’ont pas de pouvoirs mais qui croient en leur existence, peuvent-ils entrer dans cet endroit ? »
    « Oui. »
    « Et pourquoi n’as-tu rien dit à mes parents ? »
    « Je leur en ai parlé. Ils n’ont pas désiré me suivre, ils étaient trop inquiets pour ce village, à côté duquel ils vivaient. Ils étaient les seuls en mesure d’amoindrir leurs malheurs, et ils pensaient à eux avant de penser à eux-mêmes. Trop bons pour leur propre sécurité. Toi, tu peux encore échapper aux poursuites. »

    Epsylon, au coin d’un feu, pelotonnée dans une épaisse couverture piquante mais réchauffant contre le flanc de sa monture assoupie, avait écouté Alexandre se présenter, raconter sa vie, ce qu’il était – un voyageur esseulé après la mort de sa femme, emportée par la maladie, sans enfant, lancé à la recherche de ceux qui l’avait si longtemps accueilli, désireux de les convaincre de s’exiler sur cette île pour leur sécurité. Il avait appris leur assassinat, la disparition de la fille, emmenée par les mercenaires ; le village sur lequel ils veillaient tenait debout tant bien que mal, mais il n’était plus aussi fort que du temps des Enchanteurs. Alors, il avait cherché Epsylon.

    « Je t’emmènerais sur cette île. »
    « Mais tu n’y resteras pas, pas vrai ? »

    Alexandre hocha négativement la tête d’un air affecté. En silence, la jeune femme l’observa, le scruta, le dévisagea ; son visage endolori par les souvenirs sombres revenant en vagues foudroyantes était imprimé dans sa tête lorsqu’elle se laissa glisser dans les bras de Morphée, bercée par le ronflement du foyer et de sa jument calme.


Dernière édition par Epsylon le Sam 1 Aoû - 15:47, édité 2 fois
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Message  Epsylon Sam 1 Aoû - 15:45

    « Te voici à Dragonea, Epsylon. Cette île a été baptisée ainsi en l’honneur de la déesse Dragonea, qui apparu un jour à l’un de nos ancêtres pour lui confier ses enfants. Douze œufs, six races différentes de dragons : Dragon Sage, Dragon des Forêts, Dragon des Plaines, Dragon des Montagnes, Dragon de Feu et Dragon d’Eau. Chacun d’entre nous, sur cette île, élève des dragons ; aujourd’hui, les croisements entre les races, selon le sang coulant dans les veines des animaux, donnent naissance aux Dragon de Cuivre, de Fer, de Bronze, d’Argent et d’Or. »

    Juchée sur le dos d’Hespéride, Alexandre à ses côtés, monté sur son grand cheval Attila, Epsylon observait, à la fois émerveillée et craintive, la capitale de Dragonea, s’étendant au pied de cette colline au sommet de laquelle ils venaient tout juste de s’arrêter. Si Attila ne bronchait pas, Hespéride, enfermée sous les jambes d’Epsylon, était nerveuse et mâchouillait son mors d’argent. La ville s’agitait frénétiquement, bercée par le mouvement incessant d’Humains énergiques et de majestueux dragons de toutes espèces, voletant dans le ciel comme des oiseaux survoleraient la villa du Gouverneur. L’harmonie qui régnait en ce lieu entre ces créatures, craintes à travers l’Histoire, et les Hommes, était telle qu’elle ne pouvait qu’être rêvée.

    « Tu as eu des dragons, toi aussi ? »
    « Des Plaines, oui. »
    « Qu’est-ce qui les différencie ? »
    « Leurs capacités. Les Dragons des Plaines auront davantage de facilités à chasser qu’à forger, ce qui est du ressort des Dragons de Feu. »
    « Oh… »
    « Quelle race t’intéresse ? »
    « Pardon ? »
    « Tu n’as pas envie ? »
    « Je… »

    Epsylon se tut, replongeant dans la contemplation de la ville. Puis, sans un mot, elle fit faire demi-tour à sa jument et s’enfonça dans la forêt. Alexandre ne la suivit pas, et elle ne le revit jamais.

    Elle ne choisit pas de quitter l’île, mais Epsylon n’avait jamais connu le véritable sens du mot contact. De sa vie, elle n’avait jamais connu que ses parents, et sa « famille d’adoption ». La foule, les gens, les autres, lui faisaient peur. La jeune femme s’installa en ermite, dans la forêt, à mi-chemin entre la capitale et une petite ville perdue dans le centre de l’île. Peu de dragons vivaient dans la nature, sauvages ; rares étaient ses rencontres avec des dragons, tous accompagnés de leurs éleveurs. Seule avec sa jument, Epsylon regardait, spectatrice passive, la vie sur l’île se dérouler, chassant sa nourriture avec son arc et sa jument, galopant dans les longues plaines à bride abattue, songeuse jour après jour.

    Avec le temps, elle apprit à reconnaître les races. Les longs dragons étaient les Dragons d’Eau, ceux aux têtes allongées et aux grandes ailes, les Dragons des Plaines. D’autres, aux plus petites ailes, étaient les Dragons des Forêts ; les Dragons de Feu revêtaient la couleur propre au feu de camp quand il crépitait ou rougeoyait. Rose et violet caractérisaient les imposants et majestueux Dragons Sages, dont l’aura seule les caractérisait ; les plus grandes ailes étaient attribuées aux Dragons des Montagnes, plus rares au-dessus de la forêt. Mais plus que les autres tournoyaient dans le ciel au-dessus d’elle les hybrides, ceux qui n’avaient de pur que la couleur de leur cuirasse, cuivrée, argent sale, bronze brillant, argent poli, or foudroyant. Bien qu’Epsylon aimât beaucoup les hybrides, elle n’eut pour eux que le quart de l’admiration qu’elle vouait aux Dragons des Plaines, dont elle admirait la puissance et l’adresse.

    Et, un matin, on lui déposa un œuf. Qui ? Elle ne le savait pas. Peut-être Alexandre… Non, la silhouette qui partait était trop frêle, et Epsylon ne connaissait personne. Hespéride, curieuse, poussa l’œuf du nez ; la coquille se fendilla doucement, surprenant la jument qui souffla dessus. Le petit dragon qui sortait de l’œuf ferma les yeux sous le souffle brûlant en couinant ; pour la première fois depuis longtemps, Epsylon, attendrie, sourit.

    « Qui es-tu, toi ? », demanda-t-elle en s’accroupissant pour se mettre à la hauteur de la petite dragonne.

    Le doigt d’Epsylon gratouilla sous le menton de la petite créature.

    « Mandragore. »
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Message  Epsylon Sam 1 Aoû - 15:52

    *


    Epsylooooon !

    La concernée grommela et passa la tête sous l’oreiller, réflexe inutile puisque Mandragore lui parlait par pensées. Quelle plaie ! Elle qui aimait tant dormir le matin, adieu les grasses matinées… Mandragore avait deux ans, à présent, et elle était pleine d’une énergie que la jeune femme aurait préféré voir l’après-midi, plutôt qu’à longueur de journée. Si elle avait su qu’elle allait hériter d’une boule d’énergie, Epsylon aurait… n’aurait rien fait. Mandragore avait beau être agaçante au réveil, Epsylon ne regrettait pas de l’avoir avec elle – ou juste parce que ça coupait sa matinée. Bon gré mal gré, la jeune femme se redressa et s’étira en bâillant.

    « Bonjour. »
    T’en met du temps ! J’ai faim !
    « J’ai bien dormi, et toi ? »
    M’maaaan !

    Epsylon soupira. Elle craquait toujours quand sa dragonne l’appelait Maman, ne savait pas résister, aussi se leva-t-elle et alla chercher le gibier nécessaire à l’alimentation matinale de sa petite protégée. Mandragore se jeta dessus comme si elle n’avait rien mangé depuis hier – ce qui techniquement, n’était pas faux, d’autant que les saphirs se faisaient rares… L’appétit de la jeune dragonne ne cessait d’augmenter, et les saphirs disparaissaient à une vitesse folle. Epsylon avait réfléchi : si son appétit grandissait en même temps qu’elle, alors, devenue adulte, elle n’aura plus grand-chose et aucune chance de faire de Mandragore une jeune et épanouie mère. Alors qu’elle regardait l’animal dévorer son poisson maintenant, Epsylon s’enfonçait dans de sombres pensées.

    On va à la capitale ?
    « Je n’ai presque plus de poisson pour toi, et c’est pas le tout, mais je mange aussi. Il me faut des légumes. »
    Epsylon, qu’est-ce qui ne va pas ?
    « Rien. »
    Eh ! Arrête un peu de me mentir !
    « Les saphirs fuient à une vitesse incroyable… J’ai peur que tu ne connaisses pas la maternité et que tu restes seule. Je sais que ça t’ennuie de n’avoir pour compagnie qu’une Humaine et une jument qui commence à se faire vieille. Mais… les dragons sur le marché sont trop chers ! Quand aux reproductions, je doute que ce soit facile de trouver un propriétaire qui accepte les reproductions au prix minimal. Or, la nourriture coûte déjà cher… »
    Je n’ai que deux ans et demi, Epsylon, on trouvera bien une solution d’ici à ce que je sois en âge d’avoir des enfants.

    Epsylon se tut un instant, puis, alors qu’elle caressait avec douceur la tête de sa dragonne bien plus grande qu’elle à présent, elle répondit :

    « Tu as raison. »

    Et, une fois sa majorité acquise, Mandragore eut un fils, qu’Epsylon prénomma Pharaon d’Asmothète. La jeune mère railla un premier temps la fantaisie de son éleveuse, mais au fond, et Epsylon le sentait, elle aimait beaucoup ce prénom. La solution avait été à portée de main lorsqu’un jour, elle reçu trois rubis, qu’elle pu utiliser pour acheter un distributeur de gibier pour sa dragonne, réduisant les frais de nourriture et permettant une remontée des finances. Désormais, Mandragore travaillant régulièrement, la petite famille pu continuer, et la dragonne donna ensuite naissance à un hybride, Queency Caramel, Dragon de Cuivre.

    Cependant, bien qu’elle admirât la puissance et la beauté des hybrides, Epsylon n’était pas satisfaite de la tournure des évènements. Comme dans le monde où des Humains en persécutaient d’autres à cause de leur différence, les éleveurs n’avaient en tête que l’idée de créer des hybrides afin de réunir en une seule créature les facilités et les caractéristiques de toutes les races. Quel intérêt ? Se demandait-elle. Quel intérêt de faire disparaître la différence, pour une créature ultime qui, au final, ne pourra avoir de descendants ? Il n’y a de satisfaction que pour le créateur. Comment allaient-ils, tous, faire si l’essence même de leurs hybrides disparaissait ? Sans les races pures, il n’y avait pas d’hybride. Ceux qui portaient tout le poids de ce miracle – puisque, dans ses qualités résidait la notion de miracle de pouvoir réunir en un dragon toutes ces différences – étaient ces races qui n’avaient qu’une spécialité. Quand Epsylon regardait Mandragore et Pharaon, elle voyait deux dragons qui se distinguaient des autres par leurs différences, et ce qui était le plus beau chez eux, c’était ces différences. Le monde serait morne, s’il n’existait que ces Dragon d’Or, multitâches et infaillibles. Qui plus est, il devenait difficile de démarrer un élevage décent, avec les prix de ces dragons hybrides. Epsylon en savait quelque chose.

    « Tu vas être la fondatrice d’un élevage de Plaines, ça te va ? », demanda-t-elle à Mandragore.
    Eh bien, ça promet !

    Epsylon sourit. Son élevage, bien que maigre et de progression lente, prenait forme ; la jeune femme acquit d’autres races de base, Queency Caramel et Pharaon d’Asmothète devinrent père, et Epsylon termina par rencontrer PicPic.

    La jeune femme avait eu un écho de ces formations d’éleveurs appelés guildes, lors de ses fréquentes visites à la capitale pour acheter de quoi nourrir tout son petit monde. Cependant, elle ne s’y était jamais intéressée de près ; cependant, PicPic se présenta comme étant le chef de la guilde les Gardiens des Dragons, dont le principe même était d’élever au moins une race de base. Tout autant de principes et d’objectifs trottant dans la tête d’Epsylon ! Malgré sa peur, son appréhension à l’idée de rencontrer d’autres personnes, elle fut accueillie avec chaleur au sein de la guilde, lorsqu’elle y fut acceptée, à la suite de l’exposition de ses motivations. Mandragore pouvait bien raconter ce qu’elle voulait, « la vieille chouette » était bien contente de rencontrer de nouvelles personnes et de ne plus être recluse avec ses enfants dans « une mansarde perdue au fond d’une forêt ».
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